22 novembre 2016

Les Canadiens en ont assez de l’économie dictée par l’establishment et des accords commerciaux inéquitables

Tracey Ramsey estime qu’Ottawa doit revoir son approche en matière de libre-échange à la lumière du résultat des élections aux États-Unis

Par Tracey Ramsey, porte-parole du NPD en matière de commerce international et députée d’Essex.
La version originale anglaise de cet article a d’abord été publiée dans The Hill Times


Deux semaines après le dénouement choquant des élections américaines, il est difficile d’évaluer les répercussions qu’aura la présidence de Donald Trump sur l’importante relation qui existe entre le Canada et les États-Unis. Comme de nombreuses autres collectivités canadiennes, ma circonscription d’Essex est située le long de la frontière canado-américaine. Ses habitants comptent beaucoup sur une relation saine avec leurs voisins du sud, soit nos plus grands partenaires commerciaux. Certes, je suis sûre que l’amitié entre les deux pays perdurera, mais il est plus important que jamais pour notre gouvernement de se tenir debout pour les intérêts du Canada. Bien des Canadiens s’inquiètent sérieusement de la victoire de Donald Trump – et ils ont tout à fait raison. Nous devons condamner ses commentaires sexistes, racistes et xénophobes, et nous dresser contre le genre de haine et d’exclusion qui a prévalu tout au long de sa campagne. De nombreux commentateurs ont suggéré que beaucoup d’Américains ont été portés à voter pour Donald Trump pour des raisons qui n’avaient rien à voir avec son attitude révoltante à l’égard des femmes, des minorités et des immigrants. Le sénateur américain Bernie Sanders a expliqué que : « Donald Trump a misé sur la colère d’une classe moyenne en déclin qui en a plus qu’assez de l’establishment économique, politique et médiatique. » [Traduction]

« Bien des Canadiens s’inquiètent sérieusement de la victoire de Donald Trump – et ils ont tout à fait raison. Nous devons condamner ses commentaires sexistes, racistes et xénophobes, et nous dresser contre le genre de haine et d’exclusion qui a prévalu tout au long de sa campagne.»

En ce qui concerne le commerce, Donald Trump a su plaire aux Américains dont les emplois bien rémunérés ont disparu et qui ont encore du mal à joindre les deux bouts. Il a promis de renégocier ou d’abolir l’ALENA, et sa ferme opposition au PTP a mené de hauts fonctionnaires américains à confirmer que ce partenariat ne se réalisera pas. Mais les simplifications abusives de Donald Trump et son empressement à tourner le dos à des partenaires commerciaux à l’international pourraient causer des problèmes au Canada. La fin de la présidence de Barack Obama approche à grands pas et beaucoup craignent que cela ne diminue la probabilité de la conclusion d’un accord équitable sur le bois d’œuvre. Bien que le gouvernement libéral ait promis de parvenir à une entente, l’accord précédent et la période de statu quo qui l’a suivi sont maintenant expirés. De puissants lobbyistes américains pourraient déposer une requête à tout moment pour que des droits soient appliqués sur les importations canadiennes. Avec chaque jour qui passe sans entente, la probabilité de litiges coûteux augmente et les emplois de centaines de milliers de Canadiens du secteur forestier sont mis en danger. J’ai toujours accueilli favorablement l’opposition au PTP des candidats à la présidence américaine. L’effondrement du PTP représente une bonne nouvelle pour les travailleurs de l’automobile et les producteurs laitiers du Canada. Toutefois, de nombreux groupes d’agriculteurs seront déçus par la perte d’accès aux marchés. Le Canada a maintenant l’occasion de démarrer des négociations commerciales bilatérales équitables avec d’importants signataires du PTP, comme le Japon et l’Australie. Ces ententes bilatérales devront toujours permettre l’application de normes en matière de santé, d’environnement et de travail; chercher à mieux maintenir l’autorité nationale sur les services publics; et fournir un meilleur équilibre relatif aux tarifs. Le désir de Donald Trump de revoir l’ALENA a suscité des craintes au sein des entreprises canadiennes, qui comptent sur un accès sans entrave à notre plus important partenaire commercial. Cet accès aux marchés doit être défendu et protégé. Cependant, certains ont mentionné que la renégociation de l’ALENA pourrait potentiellement être profitable au Canada, pays qui fait l’objet du plus grand nombre de poursuites en vertu des dispositions du chapitre 11 de l’ALENA. Ce chapitre controversé permet à des sociétés de poursuivre les gouvernements, devant des tribunaux secrets, au sujet de règles qui pourraient selon elles avoir une incidence négative sur leurs profits. Plus de 70 % des revendications en vertu de l’ALENA depuis 2005 visaient le Canada. La renégociation pourrait fournir une occasion de revisiter cette mesure problématique. Au bout du compte, seul le temps nous dira si le président désigné des États-Unis est véritablement déterminé à mettre en place des politiques commerciales équitables visant à améliorer la vie des travailleurs américains ou si ses menaces ne faisaient que partie de sa rhétorique électorale. D’une manière ou d’une autre, le Canada devrait avoir une sérieuse conversation sur ce que cela signifie de chercher à conclure des ententes commerciales qui servent l’intérêt du peuple plutôt que celui des sociétés. La ministre du Commerce international, Chrystia Freeland, a promis de suivre une voie progressiste en ce qui concerne le commerce, mais elle n’a pas fourni beaucoup de détails sur ce que cela signifiait pour elle. Elle affirme que l’AECG est l’étalon d’or des ententes commerciales, faisant ainsi écho aux anciennes déclarations d’Hillary Clinton, qui disait que le PTP était l’étalon d’or des ententes commerciales. Et pourtant, ces deux accords permettraient à des sociétés étrangères de poursuivre des gouvernements qui cherchent à adopter des lois pour protéger l’intérêt public. L’AECG ferait également monter le coût des médicaments pour tous les Canadiens, sans qu’il y ait d’avantages connus.

« Le Canada devrait avoir une sérieuse conversation sur ce que cela signifie de chercher à conclure des ententes commerciales qui servent l’intérêt du peuple plutôt que celui des sociétés. »

Je suis sceptique quant au désir de Donald Trump de se concentrer sur les accords commerciaux équitables, mais quoi qu’il en soit, les élections de la semaine dernière ont démarré une conversation au Canada à propos du fait que la population en a assez de l’establishment économique et des accords commerciaux injustes. Les Canadiens auront besoin d’un premier ministre, d’une ministre du Commerce international et d’un gouvernement solides qui seront prêts à se tenir debout pour nos emplois et nos valeurs.