Canada's NDP

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17 février 2022

Discours de Jagmeet Singh sur la Loi sur les mesures d'urgence

Le chef du NPD du Canada, Jagmeet Singh, a fait la déclaration suivante à la Chambre des communes :

« Je vous remercie, monsieur le Président. C'est un moment critique de notre histoire. Dans quelques semaines, nous entrerons dans la troisième année de cette pandémie.

Les Canadiennes et Canadiens sont fatigués. Fatigués d'une pandémie qui a causé tant de pertes et de sacrifices pour tant de gens.

Les Canadiennes et Canadiens sont frustrés. Frustrés de voir que la situation de tant de gens s'est détériorée, alors que celles et ceux qui sont au sommet n'ont fait qu'accroître leur richesse et leur pouvoir.

Et beaucoup ont peur. Peur de la prochaine vague, de la prochaine variante. Mais aussi des autres crises auxquelles nous sommes confrontés. Des incendies et des inondations causés par le changement climatique qui détruisent leurs maisons. De perdre celles et ceux qu'ils aiment à cause d'un approvisionnement de drogues toxiques. De ne pas pouvoir obtenir les soins dont ils ont besoin quand ils en ont besoin.

Mais ni la peur, ni la frustration, ni la fatigue ne l'ont emporté sur le désir fondamental des Canadiennes et Canadiens de prendre soin les uns des autres.

Nous sommes ici aujourd'hui à cause d'un manque de leadership.

Les gens ont été abandonnés pendant que les gouvernements se disputaient les compétences. Les gens ont été abandonnés parce que les gouvernements n'ont pas pris au sérieux la menace de ce convoi. Et ils ont été abandonnés par la police, dont certain.es ont soutenu l'occupation.

On n'aurait jamais dû en arriver là.

Beaucoup de gens craignent, à juste titre, que l'utilisation de la loi sur les mesures d'urgence maintenant signifie une répression des protestations à l'avenir. Ce n'est pas une manifestation. Elle n'est pas pacifique. Les organisateur.trices de cette occupation illégale ont été clairs depuis le début. Ils sont venus ici pour renverser un gouvernement démocratiquement élu.

Elle est financée par des influences étrangères. Ils se nourrissent de désinformation. Son objectif est de perturber notre démocratie.

Nous partageons les préoccupations de nombreux Canadiennes et Canadiens qui craignent que le gouvernement n'abuse des pouvoirs que lui confère la Loi sur les mesures d'urgence. Je veux donc être très clair : nous allons surveiller la situation. Et nous retirerons notre soutien si ces pouvoirs sont utilisés à mauvais escient.

J'ai assisté à de nombreuses manifestations et grèves. J'ai été témoin du pouvoir total et brutal de la police utilisé contre des manifestants pacifiques. Des défenseurs des terres autochtones, des activistes du changement climatique, des travailleuses et travailleurs luttant pour l'équité. Et tout Canadienne et Canadiens qui utilise sa voix pour réclamer pacifiquement la justice ne devrait jamais être soumis à la Loi sur les mesures d'urgence. Les néo-démocrates ne soutiendront jamais cela.

Ce qui est devenu très clair dans cette crise, c'est qu'il faut un examen sérieux du maintien de l'ordre au Canada. Les occupant.es reçoivent des accolades de la part de la police, tandis que les autochtones et les personnes racisées sont accueillis par le canon d'une arme à feu. Il existe plusieurs témoignages de membres actuels et anciens des forces de l'ordre et de militaires impliqués dans ces occupations.

L'une des exigences de la Loi sur les mesures d'urgence est qu'une enquête publique soit menée sur son utilisation. Cela doit inclure une enquête publique complète sur le rôle des forces de l'ordre dans ces occupations, tant par leur soutien aux occupants que par leur refus d'appliquer la loi.

L’utilisation de la loi sur les mesures d’urgence est un constat d’échec flagrant pour le gouvernement, nous n’aurions jamais dû se rendre là. Mais la situation de crise à Ottawa nécessite des actions supplémentaires pour éviter que quelque chose de grave se produise.

Nous prenons l’usage de la loi sur les mesures d’urgence très au sérieux. Il n’y a pas personne qui veut revoir une situation comme celle de 1970 arrivée à nouveau. Plusieurs personnes sont encore marquées par l’usage des mesures de guerre 1970, les arrestations aléatoires, l’usage de l’armée dans les rues de Montréal. De nombreuses personnes sont inquiètes qu’une telle situation se reproduise et je les comprends. C’est pourquoi l’usage des mesures d’urgence doit être pris avec un grand sérieux et beaucoup de précaution.

Nous sommes rassurés que l’usage de l’armée n’est pas considéré et les droits prévu à la Charte des droits et libertés seront toujours maintenus, ce qui veut dire que des arrestations et saisis arbitraires ne seront pas justifiés par la loi. Mais le NPD croit qu’il n’y a aucune justification pour le moment d’utiliser les mesures d’urgence au Québec. Nous demandons des garanties au premier ministre que les mesures d’urgence seront seulement utilisées où elles sont réellement nécessaires.

À tout moment, le NPD est prêt à utiliser les mécanismes à sa disposition pour révoquer les pouvoirs au gouvernement, il n’est pas question de donner un chèque en blanc et nous aurons le gouvernement à l’œil pour éviter quelconque abus.

Au cours des dernières semaines, nous avons beaucoup entendu parler des divisions qui existent dans notre pays. Cette division a été alimentée et amplifiée par les membres de cette Chambre. Il faut que cela cesse.

Se servir d'une pandémie comme d'un coin politique pour marquer des points sur vos adversaires, pour essayer de gagner une course à la direction, ou une élection, est une erreur. Et dangereux. Ce virus ne se soucie pas de savoir pour qui vous avez voté. Porter un masque n'est pas une activité partisane. Les vaccins sauvent des vies. La grande majorité des Canadiennes et Canadiens, et des membres du Parlement, le savent et ont soutenu les efforts de vaccination.

Nous ne pouvons pas laisser la confiance des Canadiennes et Canadiens dans la science et la santé publique être érodée par l'opportunisme politique.

La pandémie change. Et notre réponse doit changer. Les restrictions sont en train d'être levées. Nous avons besoin d'un plan pour arriver au bout de la pandémie. Un plan fondé sur la science et sur notre responsabilité de prendre soin les uns des autres. Les Canadiennes et Canadiens qui ont fait tout ce qu'on leur a demandé veulent savoir ce qu'il faut faire maintenant. Les Canadiennes et Canadiens ont suivi les règlements, mais ils ont besoin de croire que les restrictions sont justes et ont un sens. Nous savons que les choses peuvent changer rapidement, que de nouvelles variantes peuvent apparaître, que les preuves peuvent changer.

Mais sans un plan clair, la confusion, la désinformation et le ressentiment grandissent.

Nous pensons qu'un plan visant à mettre fin à la pandémie doit inclure la réparation urgente de notre système de santé, afin que les gens puissent recevoir les soins dont ils ont besoin. Il doit inclure la finalisation de la vaccination, en particulier celle des enfants. Nous devons veiller à ce qu'il y ait un accès mondial aux vaccins afin d'éviter de futures variantes et vagues d'infection. Et nous devons avancer dans la résolution des problèmes que cette pandémie n'a fait qu'aggraver.

Les travailleuses et travailleurs ont payé le prix de cette pandémie. Pendant que les grandes entreprises prenaient l'argent du gouvernement et distribuaient des dividendes aux actionnaires et des primes aux PDG, les travailleuses et travailleurs de première ligne sont tombés malades. Parce qu'ils travaillaient sans congé de maladie. Les parents se sont battus pour garder leurs enfants à la maison pendant que les écoles fermaient et que les magasins à grande surface restaient ouverts.

Vous avez raison d'être en colère parce que la vie est devenue plus dure ces deux dernières années. Qu'il est presque impossible d'acheter une maison ou de louer un endroit décent pour vivre. Parce que les riches spéculateurs font grimper le coût du logement.

Vous avez raison d'être en colère parce que le coût des produits alimentaires augmente pour alimenter les profits des propriétaires d'épiceries. Vous avez raison d'être en colère parce que vous travaillez dur et payez vos impôts, mais que les riches et les grandes entreprises ne paient pas leur juste part. Vous avez raison d'être en colère car, alors que votre vie est devenue plus difficile, les riches et les puissants n'ont fait qu'accroître leur richesse et leur pouvoir.

Je suis aussi en colère. Et quand je suis en colère, je me bats. Mais j'ai appris il y a longtemps, que ma colère, mon combat, n'est pas avec les impuissants. Votre colère, votre combat, n'est pas contre les autres Canadiennes et Canadiens. Il s'agit de celles et ceux qui sont tout en haut, les puissants qui ont construit un système truqué contre les travailleuses et travailleurs. Nous pouvons changer cela, mais seulement si nous nous unissons pour lutter pour un Canada qui ne laisse pas les gens pour compte pendant que d'autres profitent.

L'histoire de cette pandémie n'est pas une histoire de division, c'est une histoire de solidarité. Celle des travailleuses et travailleurs de la santé de première ligne qui se présentent jour après jour dans des situations impossibles. C'est l'histoire des employé.es des épiceries, des agricultrices et agriculteurs et des camionneurs qui nous nourrissent. Des enseignant.es qui font de leur mieux pour communiquer avec les enfants à travers les écrans. Notre histoire est celle de voisins qui s'entraident pour se faire vacciner.

Nous ne laisserons pas les dernières semaines définir cette pandémie pour nous.

Les Canadiennes et Canadiens ont fait trop de sacrifices. Ils ont perdu trop d'êtres chers. Ils ont manqué trop de moments, pour permettre à notre pays d'être divisé par la haine et la violence.

Ne laissez personne transformer votre colère en haine. La haine est comme un feu, quand on la laisse croître, elle consume tout.

Lorsque je tiens ma fille dans mes bras, je pense beaucoup au monde que je veux pour elle. Je veux qu'elle traverse ce monde sans crainte. Je veux qu'elle se sente toujours à sa place. Je ne veux pas qu'elle soit confrontée aux mêmes difficultés que moi.

Je crois que c'est ce que nous voulons tous pour nos enfants.

C'est mon espoir. Que nos décisions dans les prochains jours soient guidées par ce désir de construire un monde meilleur, plus sûr, plus juste, où tous nos enfants se sentent à leur place. »